Objet : Situation sanitaire dans le Val d’Oise
Madame,
Dès Septembre, Nous vous avons alerté au sujet des conditions sanitaires. Notre courrier est resté sans réponse de votre part. Alors que la situation s’aggrave partout en France, nous voulons attirer votre attention sur l’urgence d’apporter des réponses concrètes à la crise actuelle.
Dans son communiqué de presse du 12 février 2021, le ministère faisait état de 103 établissements et 1599 classes (dans les structures ouvertes) fermés, contre 105 établissements et 934 classes fermés la semaine précédente, et alors que les établissements de la zone A étaient en congés. On constate ainsi la hausse importante du nombre de classes fermées. Le virus est en nette progression au sein des établissements scolaires, en attestent les 261 classes fermées dans l’Académie de Versailles (le taux le plus élevé en France au 12 février). Dans le Val d’Oise, la fermeture d’un établissement tout entier avant les congés de février nous préoccupe à plus d’un titre. Alors que nous attendions du Ministre une réelle prise de conscience de la situation et des réponses adaptées, nous avons appris la veille des vacances que le protocole sanitaire était modifié et que les cas de variants anglais ne déclencheraient pas automatiquement les fermetures d’établissement. Le « pas de vague » est de mise au détriment de la santé des élèves et des personnels de l’Éducation Nationale.
Pourtant, le protocole « renforcé » n’était déjà ni applicable ni appliqué dans de nombreux établissements. Sans concertation des équipes enseignantes, le protocole sanitaire reste une théorie et un coup de communication de la part de notre ministre.
- La distance d’un mètre préconisée par le protocole entre les élèves lorsqu’iels sont côte-à-côte ou face à face n’est pas possible dans des classes surchargées de 30 élèves, notamment dans les collèges où l’enseignement s’effectue en présentiel la totalité du temps.
- Le protocole précise que pour les élèves des écoles élémentaires, des collèges et des lycées, le port du masque « grand public » de catégorie 1 est obligatoire dans les espaces clos ainsi que dans les espaces extérieurs. Il appartient aux parents de fournir des masques à leurs enfants. Or ce n’est pas aux familles d’assumer la charge que représentent les masques. Par ailleurs, dans la pratique, comment pouvons-nous savoir que les élèves changent leur masque toutes les quatre heures ? Qui est apte à vérifier qu’il s’agit bien d’un masque de catégorie 1? Avons nous le nombre de personnel suffisant pour vérifier les masques à l’entrée des établissements ?
- L’aération est également l’une des mesures recommandées : le protocole mentionne quelques minutes d’aération toutes les heures. Nous vous invitons à visiter des établissements pour vous rendre compte que dans beaucoup de classes, les fenêtres ne s’ouvrent pas, restent cassées pendant des mois ou au contraire, complètement ouvertes ne permettent pas d’assurer la sécurité des élèves. De plus, faut-il vous rappeler que par les températures actuelles, les élèves sont contraint-e-s d’étudier dans le froid, parfois vêtu-e-s de leurs manteaux voire de leurs gants ? Et ce parce que le ministre s’entête dans son refus de généraliser les demi-groupes quel que soit le niveau. Les locaux dans lesquels mangent les personnels sont trop souvent exigus et mal aérés, or c’est lorsque l’on ne porte pas de masque que les risques de contamination sont les plus élevés. Aucune solution n’a été apportée à ce problème dans la plupart des établissements, mettant en danger les personnels.
- La limitation du brassage est le point le plus problématique. En effet, le protocole recommande que l’arrivée et le départ des élèves dans l’établissement soient étalés dans le temps. Dans la plupart des établissements scolaire, cette mesure est inapplicable car l’arrivée comme le départ des élèves sont conditionnés par les transports scolaires. De la même façon, le protocole recommande qu’une salle soit attribuée à une classe, en dehors des salles spécialisées et des ateliers. Dans notre département, beaucoup de locaux n’ont pas une capacité suffisante pour attribuer une salle par classe sans que le nettoyage soit fait. Cette mesure n’est que peu appliquée et dans de nombreux établissements, les élèves changent de salles à chaque heure de classe. Enfin, le protocole préconise qu’un sens de circulation soit instauré et respecté et que les récréations soient organisées par groupes. Là encore, trop rares sont les établissements où cela est possible, notamment du fait de trop faibles effectifs en vie scolaire.
Dans de nombreux établissements du Val d’Oise, les effectifs de vie scolaire, déjà insuffisants en temps normal, sont encore plus limités : de nombreuses équipes d’AED étant positives au covid 19 ou encore cas contact, certains établissements ont fonctionné sans vie scolaire, ce qui a engendré des tensions importantes et mis en danger élèves et personnels. Il est impératif de recruter des AED afin d’assurer la sécurité des élèves dans cette période d’importantes tensions.
Dans cette crise sanitaire, l’ensemble des personnels se retrouvent à assurer des fonctions qui ne figurent pas dans leur fiche de poste. Les agent-e-s sont particulièrement affecté-e-s par les mesures sanitaires, leurs conditions de travail se dégradent et les équipes, souvent en sous-effectif, sont épuisées. Il est impératif de recruter massivement des agent-e-s pour assurer la désinfection des salles et le bon fonctionnement des services de restauration notamment.
Lorsque les classes sont fermées, il revient aux enseignant-e-s d’assurer la continuité pédagogique. Nous vous avons déjà alertée à ce sujet, cela pose de nombreux problèmes, restés sans réponse. Les inégalités entre les élèves sont accrues dans le contexte d’un enseignement dispensé à distance. Rien n’a été mis en place depuis le premier confinement pour assurer à tous-tes l’accès à du matériel informatique permettant d’étudier. Les enseignant-e-s doivent également utiliser leur propre matériel informatique, la prime destinée à cet équipement n’ayant, d’ailleurs, toujours pas été versée à ce jour. Nous souhaitons également souligner qu’il nous semble anormal que ce soit généralisée l’utilisation du logiciel Pronote, logiciel privé, dans la mise en place de la continuité pédagogique. Dans les lycées qui ont adopté l’enseignement en distanciel, les élèves doivent s’adapter à une multitudes d’outils. L’Éducation Nationale aurait dû se doter d’outils spécifiques, gratuits et éthiques.
Depuis Septembre, le gouvernement refuse de confiner le pays et maintien les établissements scolaires ouverts en donnant l’argument que l’école à distance a renforcé les inégalités et qu’il faut à tout prix éviter cela. Nous sommes d’accord sur ce point toutefois nous ne pensons pas que le protocole sanitaire permette d’assurer une égalité entre les élèves. Tous les lycées du Val d’Oise n’ont pas adopté le système de demi-groupe. Certains seront donc plus en avance dans le programme que d’autres, ce qui nous interroge sur les modalités d’examens sur l’année 2021-2022 pour les disciplines évaluées en deux ans. Travailler en petit groupe permet aux enseignant-e-s d’aider davantage leurs élèves et de remédier à certaines lacunes accumulées durant ces derniers mois, qu’en est-il des élèves n’ayant pas la chance d’être en demi-groupe ? Au sein des lycées appliquant le système hybride, les inégalités se creusent entre ceux et celles qui parviennent à assister aux classes virtuelles, à travailler en autonomie et ceux et celles qui sont en décrochage. Alors que M. Blanquer avait décidé de ne pas évaluer les élèves sur des travaux en distanciel pendant le confinement, il n’en est rien en ce moment. Enfin, nous constatons que les dispositifs d’aide personnalisée sont mis en suspens pendant la situation sanitaire. Occupées par la gestion des cas COVID, les infirmières scolaires n’ont pas le temps nécessaire pour mettre en place les PAI, ou faire quoi que ce soit d’autre avec les élèves. L’argument de l’égalité républicaine est encore une vitrine pour notre gouvernement.
Nous souhaitons enfin vous interpeler sur les suites données aux nombreux droits de retrait exercés par nos collègues depuis le début de la crise. Il revient à l’employeur d’assurer la sécurité des personnels suite à l’exercice du droit de retrait, comme stipulé par l’article L 4121-1 du code du travail. « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1- des actions de prévention des risques professionnels…
2-des actions d’information et de formation.
3- la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes ».
Force est de constater que ces mesures n’ont pas été prises, ce qui est donc totalement illégal. N’ayant pas de retours concrets quant aux registres RSST et RDGI, les personnels ont parfois été contraints d’exercer leur droit de grève. Cette situation est particulièrement alarmante : les personnels se sentent en danger et méprisés par l’institution qui n’apporte aucune réponse à leurs inquiétudes légitimes.
Dans cette crise sanitaire, l’institution met en danger les personnels, les élèves et leurs familles. Il est impératif d’apporter des solutions concrètes, et ce d’autant plus que l’on assiste à l’explosion des cas de COVID 19 et avec l’apparition de nouveaux variants particulièrement contagieux.
Nous vous demandons donc :
- de recruter massivement et dès à présent des personnels enseignants, des AED, des infirmières scolaires…
- d’élargir les demi-groupes à l’ensemble des établissements
- d’équiper l’ensemble des élèves et des personnels de matériel informatique.
Veuillez croire, Madame la Rectrice, en notre attachement au service public d’éducation.