De l’intolérance et du ridicule, c’est ainsi qu’Aristide Briand qualifie l’idée d’interdire un costume religieux dans l’espace public, lorsqu’il défend la loi de 1905, mettant en place la laïcité. Pour lui, interdire, alors que cette loi vise à garantir la liberté de conscience et de religion, ça n’avait pas de sens.
Pourtant, en France, depuis les années 1980, la laïcité est devenue pour l’État et les gouvernements successifs un moyen de mettre en place une stigmatisation ciblée à l’encontre des personnes musulmanes ou supposées musulmanes, stigmatisation qui passe notamment par des interdictions vestimentaires. Ainsi, à la rentrée 2023, Gabriel Attal a décidé d’ouvrir l’année scolaire sur une veille rengaine islamophobe. La polémique sur les foulards, qui ciblait déjà les jeunes filles musulmanes, a été à l’origine de la loi de 2004 interdisant les « signes religieux ostentatoires ». En 2022, la circulaire « Plan Laïcité » insiste sur le fait qu’un vêtement (n’importe lequel !) peut être considéré comme religieux « au regard du comportement de l’élève ». Nouvelle polémique, nouvelle interdiction ? En tout cas le nouveau ministre de l’Éducation nationale a proscrit « les tenues de type abaya ou qamis », considérant que ces vêtements « manifestent ostensiblement en milieu scolaire une appartenance religieuse ».
Pourtant, ces tenues ne sont nullement définies par le ministère et l’interprétation de leur caractère religieux est laissée à l’arbitraire des chef·fes d’établissement. Des situations ridicules ont déjà eu lieu : Kimonos ouverts et ensembles unicolores sont désormais des signes religieux ostentatoires pour les équipes de direction.
Cette annonce laisse penser que certaines élèves, musulmanes ou perçues comme telles, ne sont pas les bienvenues à l’école. Ainsi, les robes jugées « trop longue » par le ministre et les chef·fes d’établissement deviennent désormais le signe ostentatoire d’un prosélytisme religieux organisé par des élèves de 11 à 18 ans. SUD éducation 95 dénonce ce fantasme raciste, sexiste et complotiste. Nous rejetons ces mesures qui projettent sur des enfants la vision raciste du gouvernement, les privant ainsi de leur droit à une scolarité insouciante et apaisée.
Ces attaques sont insupportables et sont bien plus qu’une diversion : elles sont des avatars du maintien de l’idéologie coloniale et sont le résultat de politiques et d’un ordre du jour racistes, islamophobes et sexistes.
Une nouvelle fois, ce sont les corps des élèves musulmanes ou perçues comme musulmanes qu’il s’agit de contrôler, de brimer et de réprimer.
Dans le Val d’Oise
Dans le Val d’Oise des élèves de lycée ainsi des personnels se sont vues refuser l’entrée à leur établissement scolaire ou ont subi des remarques sexistes et islamophobes. Dans chacun des cas, les kimonos ou les robes sont jugées trop longues, trop colorées, trop couvrantes, les bandeaux trop larges.
En plus de stigmatiser les élèves, les chef·fes utilisent d’ores et déjà ce cadre imprécis pour s’arroger le droit de rhabiller les personnels au prétexte de l’exemplarité devant les élèves. Ainsi, toute tenue qui pourrait suggérer un doute quant à sa ressemblance avec une « abaya » ou un bandeau risque désormais d’être interdite.
Sud éducation 95 soutient
- Les élèves et leur liberté d’expression vestimentaire et contre les remarques islamophobes et sexistes des adultes.
- Nous refusons que l’école devienne un champ de bataille politique où l’objectif du ministre de l’éducation nationale serait de séduire les électeurs·trices du RN et tous les réactionnaires.
- Nous défendons rigoureusement la laïcité qui implique une neutralité totale de l’Etat et de ses institutions en matière religieuse.
- Nous exigeons l’accès à l’éducation pour tous.tes, sans discrimination.