Le ministère présente son dispositif comme une grande « concertation […] au cœur des territoires pour faire émerger l’école du futur ». Il s’agirait d’une « méthode nouvelle » qui permettrait de « faire émerger, au niveau local, des initiatives de nature à améliorer la réussite et le bien-être des élèves, et [de] réduire les inégalités ». Les « acteurs de terrains » sont ainsi appelé à se réunir et, « sans aucun cadre imposé » à élaborer des « projets pédagogiques innovants ». Ce dernier terme, particulièrement creux, dessinerait tout un ensemble de propositions qui iraient de la sortie ou du voyage scolaire à la restructuration des locaux ou de la cour de récréation, en passant même, nous dit-on, par le réaménagement de la carte scolaire. Une fois les diagnostiques terminés et les « projets » élaborés, une commission d’examen, « présidée par le Recteur ou la Rectrice et composé d’au moins trois membres nommés par lui » déciderait, seule et arbitrairement, d’attribuer des fonds, ou non, aux différents dossiers.
Vantant la « concertation », la « discussion », le « volontariat », il s’agit en réalité d’une nouvelle injonction, strictement encadrée par le haut. La solution du ministère face au démantèlement de l’école publique que lui-même organise par son sous-financement passe donc une nouvelle promesse de financement de certains « projets innovants » au prix de la concurrence généralisée des établissement et des équipes, de l’explosion du temps de travail (nouvelles réunions, dossiers administratifs) et de l’accroissement des inégalités face au service public d’éducation.
Derrière la langue managériale, les objectifs, même particulièrement flous, se placent en effet dans la droite ligne des expérimentations lancées à Marseille en 2021 : aller vers l’autonomie des établissements, créer de nouvelles strates hiérarchiques, étendre le pilotage par les évaluations nationales et limiter notre liberté pédagogique, instaurer progressivement un système de financement par l’appel à projets et soumis à la validation et à l’arbitraire d’une poignée de personnes.
Cet arbitraire semble également prévaloir dans la façon dont sont distribuées les sommes à l’issue de la concertation. Un établissement du Val d’Oise a ainsi déjà reçu des fonds et… des IMP ! Sans avoir présenté le moindre « projet ». L’opacité règne.
Pour combattre les inégalités et bâtir une école émancipatrice, Sud Education revendique un véritable plan d’urgence pour l’éducation. Le ministère pourrait ainsi songer à une baisse des effectifs des classes et à des dédoublements, à des AESH en nombre suffisant pour accompagner toutes celles et tous ceux qui en ont besoin ainsi que la création d’un véritable statut pour elleux, à l’embauche de personnels de vie scolaire et à leur titularisation, à des moyens médico-sociaux renforcés, au rétablissement des moyens de remplacement dans le 1er et le 2nd degré. [Le ministère pourrait, aussi, commencer par rémunérer toutes les heures effectuées par les personnels (devoirs faits, PPRE, vie de classe, heures supplémentaires).
Alors que dans notre département les présentations sont organisées par les directions des établissements et que certaines équipes pourraient être tentées d’y participer au vu de l’enveloppe de 500 millions d’euros débloquée pour ce dispositif, refusons cette mise en concurrence et revendiquons des moyens conséquents et égalitaires pour l’école publique. Pour une école émancipatrice et véritablement inclusive, pour tous et toutes.